C’est la principale mesure – la seule, ou presque, avec onze « cavaliers sociaux » – que vient de retoquer, dans la loi de financement de la Sécurité sociale, le Conseil constitutionnel, saisi, comme il est de coutume une fois ce budget adopté, par des députés et sénateurs de l’opposition : dans leur décision rendue mardi 20 décembre, les sages de la rue de Montpensier censurent les dispositions introduites dans l’article 101 du texte précité, visant à limiter l’indemnisation par l’Assurance-maladie d’arrêts de travail prescrits dans le cadre d’une téléconsultation.

Ces dispositions prévoyaient que lorsqu’un tel arrêt de travail est prescrit « à distance », l’assuré ne bénéficie pas du versement d’indemnités journalières si son incapacité physique n’a pas été constatée par son médecin traitant ou par un médecin l’ayant déjà reçu depuis moins d’un an. Une façon, expliquait cet automne le législateur, de prévenir les risques d’abus, alors que l’Assurance-maladie entend renforcer sa stratégie de lutte contre la fraude en matière de protection sociale.

Porté par les vagues de Covid-19, le recours aux téléconsultations s’est ancré dans les habitudes : une récente étude de la Drees a chiffré à 13,5 millions en 2020, puis à 9,4 millions en 2021, le nombre de téléconsultations réalisées par des généralistes libéraux. Dans les quatre premiers mois de l’année 2022, 5 millions de consultations à distance ont encore été réalisées. Des bilans à relativiser, toutefois, au regard de l’ensemble de l’activité de médecine générale libérale.

Syndicats de médecins inquiets

La pratique ne sera donc pas freinée, ou en tout cas pas selon les modalités évoquées dans la loi de financement de la « Sécu ». Pour les sages, les dispositions de l’article censuré « peuvent avoir pour effet de priver l’assuré social (…) du versement des indemnités journalières alors même qu’un médecin a constaté son incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail ». Pour cette raison, l’article visé n’est pas conforme au 11e alinéa du préambule de la Constitution de 1946, selon lequel « tout être humain qui (…) se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence », lit-on dans leur décision.

La volonté d’encadrement est plutôt bien accueillie par les syndicats de médecins, inquiets d’un contournement du parcours de soins et de l’offensive de certaines plates-formes commerciales.

Le Conseil constitutionnel a validé tous les articles emblématiques de ce texte, dont l’allongement, contesté, de l’internat de médecine générale. Il a en revanche donné tort aux députés de gauche qui avaient déposé un recours sur ses conditions d’adoption à coups de 49.3.

lien source : Budget de la « Sécu » : le Conseil constitutionnel censure une disposition sur les arrêts de travail