

Le théâtre aura été sa passion. Colette Godard, grande critique du Monde, est morte à Paris, samedi 31 décembre, à 96 ans. Cet automne encore, elle allait voir des pièces. Elle avait commencé enfant, avec ses parents. Son père était juif d’origine géorgienne, sa mère juive d’origine russe. Dans les années 1910, ils sont venus d’Ukraine en France, parce que c’était le pays de la liberté et des droits de l’homme. Après Paris, ils se sont installés à Rouen (Seine-Maritime) où Samuel Meghberg, le père de Colette et de ses quatre frère et sœurs, dirigeait une usine de confection.
« Ils nous emmenaient voir tout ce qui passait, théâtre, opérette et opéra », se rappelait Colette. Elle avait des souvenirs anciens très précis, mais surtout, une certitude en forme d’évidence : « Le théâtre, c’était normal. » En revanche, il a fallu que le grand âge vienne pour que Colette parle de la seconde guerre mondiale. En 1942, quand une rafle a été annoncée à Rouen, une partie de la famille ne l’a pas cru. Elle est morte en camp de concentration. L’autre partie de la famille s’est réfugiée en zone libre. Comme beaucoup, Colette minimisait le rôle qu’elle a joué du côté de la Résistance : « Je portais des lettres, avec un ami. » Un jour, tous les deux ont été pris, et séparés. Colette a été conduite dans le bureau du chef de la Kommandantur, à Agen. « J’étais seule avec lui, il a regardé mon passeport et m’a dit : qu’est-ce que vous faites en France avec un nom étranger ? » Puis cet officier allemand, qui savait évidemment que Colette était juive, est sorti de son bureau. Colette a quitté la Kommandantur, mais elle n’a jamais su ce qu’était devenu son ami, probablement fusillé. « Depuis, je ravale ma culpabilité », avouait-elle.
Avant, la famille a transité un temps à Marseille où Colette a découvert, dans l’hôtel où logeait sa famille, le monde interlope des travestis – un amour qui ne l’a jamais quitté. Toute jeune, elle fait ses premières armes au théâtre avec son frère, Jean Serge – un des futurs fondateurs d’Europe 1 –, qui rouvre les Bouffes du Nord, à Paris, sous le nom de Théâtre des Carrefours, en 1945, et crée Les Bouches inutiles, de Simone de Beauvoir.
Absence de préjugés, regard vif, goût de la découverte
Très vite, Colette entre à la radio, où elle devient une voix de la Radiodiffusion française, puis de France Culture, avec ces qualités dont elle ne se départira jamais : absence de préjugés, regard vif, goût de la découverte. Colette n’aimait rien autant que traquer la nouveauté, repérer l’insolite et en dégager le sens. Elle s’y est employée sans relâche, avec une énergie qui laisse pantois.
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lien source : Colette Godard, critique de théâtre au « Monde », est morte