

Trois tours mais toujours pas de président. Les élus de la Chambre américaine des représentants ont clos, mardi 3 janvier, leur séance sans parvenir à élire leur speaker. Il s’agit d’une première en cent ans : depuis 1923, ce poste essentiel – troisième personnage le plus important de la politique américaine après le président et le vice-président – avait toujours trouvé preneur dès le premier tour.
Cet événement constitue un revers pour les républicains, et en particulier pour Kevin McCarthy. Grand favori pour remplacer la démocrate Nancy Pelosi, l’élu californien n’a pas réussi, après trois votes successifs, à calmer la fronde émanant d’un groupe de trumpistes qui le jugent trop modéré. Les élus se sont accordés pour suspendre leurs votes jusqu’à mercredi matin – le temps de négocier en coulisses.
Au premier tour, M. McCarthy n’a rassemblé que 203 des 218 voix nécessaires à son élection, malgré les 222 élus de son camp à la Chambre. Il a récolté un score identique au deuxième tour. Lors du troisième et ultime vote du jour, l’élu républicain a même perdu une voix (202), son rival démocrate au poste, Hakeem Jeffries, faisant mieux avec 212 votes à chacun des trois tours, sans entretenir d’illusions néanmoins sur ses chances de nomination.
« Il ne faut pas le prendre personnellement, mais l’avenir de notre pays en dépend », a assuré Chip Roy, turbulent élu républicain du Texas. La candidature de M. McCarthy est pourtant largement soutenue au sein de son parti : l’annonce de sa nomination mardi dans l’hémicycle a été reçue par une grande ovation debout dans les rangs du Grand Old Party (GOP).
Vingt trouble-fêtes
Au début du troisième tour, un certain agacement commençait à se faire sentir, les républicains les plus modérés exhortant leurs collègues à se ranger autour de Kevin McCarthy. « Nous sommes venus ici pour accomplir des choses », a plaidé le chef du groupe républicain, Steve Scalise, à quoi les démocrates ont opposé des rires.
Tout au long de cette procédure, le parti de Joe Biden a fait bloc autour de la candidature d’Hakeem Jeffries, applaudissant régulièrement l’élu de New York aux sons de « Hakeem, Hakeem, Hakeem ! ».
Kevin McCarthy, qui dirige depuis 2014 son groupe à la chambre basse du Congrès, est resté ferme face aux oppositions au sein de son parti. « Nous resterons jusqu’à ce que nous gagnons », a-t-il affirmé aux journalistes, ajoutant que les chiffres « vont finir par changer » sans toutefois démontrer comment cela allait être possible.
La position de l’élu de Californie s’est fragilisée en raison de la contre-performance du GOP aux élections de mi-mandat, en novembre 2022, et du fait d’une poignée d’élus trumpistes, qui l’accusent de ne pas être assez conservateur. Ceux-là ont décidé de jouer les trouble-fêtes ; cinq ont même publiquement dit qu’ils voteraient contre lui, et une vingtaine d’entre eux n’ont finalement pas voté pour lui. « Kevin ne croit en rien, il n’a pas d’idéologie », a ainsi taclé Matt Gaetz, turbulent élu de Floride.
Sans leur soutien, l’élection de Kevin McCarthy paraissait bien compromise d’autant que deux autres élus républicains, Andy Biggs et Jim Jordan, ont obtenu respectivement dix et six voix au premier tour, aucune et dix-neuf au second, aucune et vingt au troisième.
Kevin McCarthy avait déjà échoué de peu en 2015
Kevin McCarthy semblait pourtant vouloir donner des gages à cette frange conservatrice pour éviter que l’histoire ne bégaie : en 2015, il avait déjà échoué de peu à devenir président de la Chambre des représentants face à une fronde de l’aile droite du GOP. Mais il ne pouvait pas se permettre d’aller trop loin au risque de s’aliéner les républicains modérés.
Avec les républicains majoritaires à la Chambre, Joe Biden et les démocrates ne pourront pas faire passer de nouveaux grands projets. Mais avec un Sénat aux mains des démocrates, leurs rivaux non plus. Se retrancheront-ils dans une opposition systématique ? Il faudrait pour cela qu’ils arrivent à faire bloc, alors que certains de leurs élus ont – comme lors du vote du budget avant Noël – voté avec les démocrates.
L’élection du speaker sert donc aussi à mesurer la capacité de nuisance des républicains pour la Maison Blanche. Etre face à une Chambre des représentants hostile pourrait se révéler être une aubaine politique pour Joe Biden, s’il confirme son intention de se représenter en 2024 – une décision qu’il doit annoncer en début d’année. En cas de paralysie législative, il rejettera sans aucun doute la faute du blocage sur des républicains fragilisés, espérant ainsi tourner la situation à son avantage.

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lien source : Etats-Unis : la Chambre des représentants échoue à élire son « speaker », un revers pour les républicains